2017 est un beau
millésime, très beau même dans le Beaujolais, né d’un nouvel été chaud, sec et
de vendanges précoces, dès la fin du mois d’août chez certains. 2017 a
également été bien cruel
avec de nombreux vignerons qui ont pu toucher du doigt une fois de plus la
réalité du réchauffement climatique et de ses dérèglements. « Mon père
n’avait jamais connu deux années consécutives avec des orages de grêles aussi
dévastateurs », assure Éric
Janin du Domaine Paul
Janin, à Romanèche-Thorins, en AOC Moulin-à-Vent. Dans les zones les plus touchées, sur Fleurie notamment, certains
n’ont même pas fait de récolte du tout, et ailleurs,
la simple lecture des fiches techniques déposées par les vignerons en même
temps que leurs vins du millésime 2017, annonçait fréquemment des rendements à l’hectare de vingt-cinq hectares par hectolitre,
voire parfois beaucoup moins ; il faut avoir les reins solides quand cela
vous tombe dessus, qui plus est deux années de suite comme dans certains
secteurs. Côté qualité, rien à redire en revanche sur 2017, bien au contraire
et ce même dans les zones grêlées ; l’été a permis de sécher les baies
meurtries, de mûrir les raisins et dans la partie centrale des crus, celle qui
a été touchée, le niveau de qualité est élevé, très élevé même parfois. Les
vignerons se sont adaptés en cuverie en assemblant la récolte de plusieurs vignes
pour faire des cuvées « rondes », en redoublant d’attention dans le
tri des raisins, ou encore en pratiquant des égrappages plus importants qu’à l’ordinaire.
« C’était indispensable. La proportion de rafles, parfois bien abîmées par
les grêlons pour ne rien arranger, était trop importante par rapport aux baies
et en raisins entiers, on
risquait d’avoir des goûts végétaux », explique Mathieu Mélinand, du Domaine des Marrans, à Fleurie.
Le millésime est donc beau,
mais aussi cruel, car on imagine d’autant plus facilement ce que 2017 aurait pu
donner à Fleurie, Morgon, Chiroubles,
Régnié, Chénas ou Moulin-à-Vent sans ces orages de grêle, que l’on peut
s’en rendre compte en dégustant les brouillys, côte de brouilly, juliénas et saint-amour… les crus épargnés
en 2017 par les intempéries. Le retour début septembre d’un peu de pluie sur le
Beaujolais, de conditions météo plus fraîches, plus « normales »
(après une dernière semaine d’août à plus de 35 degrés à l’ombre) a permis d’apporter
du jus dans les baies et de vendanger dans de bonnes conditions des
raisins très mûrs, titrant souvent plus de 14 degrés naturels. Dans ces villages,
les vignerons ont produit des vins proches du niveau des formidables 2015,
spectaculaires de richesse, de densité, de chair, dans un registre solaire,
« rhodanien », mais sans le côté un peu cuit que pouvaient présenter
les 2003.
L’actualité dans le
Beaujolais, c’est aussi l’arrivée de 2018, un autre millésime de soleil et
celui-ci sans le moindre accident climatique. C’est aussi la prise de
conscience, que nous évoquions déjà l’an dernier, de la nécessité de passer à
une viticulture plus respectueuse de l’environnement. Beaucoup de vignerons en
parlaient ces dernières années et ils passent concrètement aux actes,
progressivement, en revenant au travail des sols, en lançant des
« expérimentations » parfois en bio sur une partie de leur domaine.
Le travail de restructuration du
vignoble en vignes plus larges
(souvent 1,20 m x 80 ou 90 cm entre les pieds) se poursuit, dans le
but de pouvoir passer plus facilement dans les rangs, de les enherber, mais sur ce point, il faut
être lucide. L’environnement économique du Beaujolais est meilleur aujourd’hui qu’il
y a dix ans, mais encore
bien fragile. Le vignoble restant aujourd’hui encore largement organisé en
vignes basses, étroites, à haute densité de 10 000 pieds/hectare, où l’on se
faufile difficilement entre les « cornes » des pieds », avec souvent
de fortes pentes, l’extension des surfaces cultivées plus
« naturellement » passera inévitablement par la restructuration
onéreuse de ce vignoble et cela ne se fera pas en un jour…
Christophe
Tupinier
Chiffres
officiels à la récolte 2017 (sources douanes – Inter Beaujolais)
Brouilly : 1 238 hectares – Chénas : 233 hectares – Chiroubles : 317 hectares – Côte-de-Brouilly : 315 hectares – Fleurie : 863 hectares – Juliénas : 548 hectares – Morgon : 1 098 hectares – Moulin-à-Vent : 634 hectares – Régnié : 418 hectares – Saint-Amour : 308 hectares.Total crus : 5 972
hectares – 230 200 hectolitres.
Total
Beaujolais 2017 : 15 040 hectares – 571 352 hectolitres.
Il vous reste à découvrir l’intégralité du guide d’achat de plus de 500 crus du Beaujolais 2017 publié dans le dernier numéro de Beaujolais Aujourd’hui, supplément au numéro 146 de Bourgogne Aujourd’hui qui vient de sortir. L’ensemble est disponible à l’achat au numéro et/ou par abonnement.
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