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publié le 05 mai 2015

Quand les vins du Beaujolais défient le temps !

 

Les clichés ont la vie dure et on entend souvent dire, y compris par des sommeliers ou même des vignerons, que les vins du Beaujolais sont gouleyants, fruités, à boire jeunes et de préférence un peu
frais. Chacun peut bien sûr déguster les vins qu’il achète, du
Beaujolais ou d’ailleurs, quand bon lui semble, mais il est aussi possible de
considérer que des vins rouges à la texture patinée par le temps, aux arômes de
fruits confits, d’humus, d’épices… présentent un certain intérêt. Dans ce
domaine, les grands vins du Beaujolais n’ont pas à rougir de la comparaison
avec les grands vins de Bourgognes ou de Bordeaux pour citer ces références en la matière. Nous gardons en mémoire une
soirée organisée il y a quelques années à la maison Louis Jadot, à Beaune, à l’occasion du départ en retraite de son directeur technique emblématique,Jacques Lardière. Ce soir-là la maison avait servi à ses invités (journalistes, restaurateurs, courtiers, importateurs, vignerons et négociants d’autres régions…) beaucoup de très grands et très vieux
vins au milieu desquels un moulin-à-vent Clos de Rochegrès 1985 d’une grande
classe, riche, soyeux et délicat qui avait fait sensation. On dit parfois qu’au vieillissement les vins
du Beaujolais « pinotent », entendez par là se rapprochent des vins
de Bourgogne issus du pinot noir. Oui et non. Le Beaujolais est à mi-chemin
entre la Bourgogne et le nord de la vallée du Rhône. Un millésime chaud sera de style plus
« rhodanien » et un millésime frais plus « Bourguignon ».
Jeunes et/ou au vieillissement, les vins rouges du Beaujolais balancent donc toujours entre
la chair des vins du nord de la vallée du Rhône et la fraîcheur des vins de
Bourgogne.

Alors oui, les grands vins rouges du Beaujolais, les crus
bien sûr, mais aussi les beaujolais et beaujolais-villages de coteaux, ont un
potentiel de vieillissement de plusieurs décennies et ce pour plusieurs
raisons. Certaines régions ont été mieux dotées que d’autres à la naissance. La
combinaison entre un savoir-faire humain ancestral, un ou plusieurs cépages (en
l’occurrence le gamay) bien adaptés au milieu et des terroirs de grande
qualité, aboutit, quand le millésime veut bien y mettre du sien, à la
production de grands vins nobles, de longue garde. Certains l’ont peut-être
oublié, mais le Beaujolais a tout cela en « magasin ». Vient ensuite
la mise en oeuvre.

Pas de recette miracle
Christian Bernard, 46 ans, du domaine Grands Fers, à Fleurie, est
l’un des meilleurs spécialistes du Beaujolais dans la production de vins de
garde. Quand on lui demande très simplement ses secrets, il la joue modeste. «
Vraiment je ne vois rien de bien particulier, des vieilles vignes, une
viticulture proche de l’esprit bio mais sans certification, des macérations
longues, des élevages de dix-huit à vingt-quatre mois, et voilà tout ». Pour ce
vigneron à l’évidence réfléchi, qui se pose les bonnes questions, ce qui peut sembler banal, pourrait bien être l’explication de
l’exceptionnelle longévité de ses fleurie Le Clos (parcelle arrachée il y a
cinq ans et qui ne sera pas revendiquée avant une dizaine d’années) et Les
Roches.
Christian Bernard exploite depuis un quart de
siècle ce domaine familial de cinq hectares presque exclusivement en fleurie. À
la vigne, son objectif est de travailler au maximum dans le respect de
l’environnement et de la biodiversité. « Nos terroirs granitiques sont un
véritable bac à sable en surface, alors il faut faire attention quand on travaille
les sols à ne pas favoriser l’érosion. On gratte le sol en douceur pour faire
descendre les racines. C’est comme cela que les terroirs s’expriment », assure le vigneron qui poursuit : « Je crois que s’il y a un secret pour
produire des vins de garde, c’est d’avoir des vieilles vignes et j’ai la chance
d’avoir un vignoble ancien, qui produit peu, mais de superbes raisins. Bon, je
crois aussi qu’il est important de bien travailler en vinification, de faire
macérer longtemps, mais également d’élever les vins. Mes fleurie sont élevés
dix-huit à vingt-quatre mois dans des contenants de tailles différentes : fûts
de 228 litres, demi-muids de 600 litres, foudres d’une quinzaine d’hectolitres.
C’est un paramètre important. Avoir un bon jus au départ est essentiel, mais il
faut ensuite le nourrir, l’affiner, le patiner, le stabiliser pour que le vin
puisse ensuite bien vieillir. Il y a toujours eu dans le Beaujolais une
tradition d’élevage en fûts de chêne. Parfois, aujourd’hui les vins du
Beaujolais issus de jolis élevages sont rejetés par les consommateurs, les
distributeurs et c’est dommage ».Le dossier complet sur le vieillissement des vins du Beaujolais est à lire dans le prochain numéro de Beaujolais Aujourd’hui, supplément joint à Bourgogne Aujourd’hui n°123 (disponible en ligne sur ce site le 11 mai et en kiosque le 13 mai).

Dégustation : Quelques vieux Beaujolais de rêve

Morgon 2005

Domaine de la Bêche (Villié-Morgon – 69)

Le nez est puissant, sur les fruits noirs et les épices. La
bouche est compacte avec un fruité confituré agréable. Le vin est serré, dense,
tendu, un peu rustique et peut encore se garder.

Moulin-à-Vent Vieilles Vignes 2005

Château Portier, Denis Chastel-Sauzet (Romanèche-Thorins –
71)

Vin d’une belle longueur, dense, racé, à la finale encore
fermée. Ce moulin-à-vent ne manque pas de concentration, de profondeur et il
peut être « oublié » quelques années de plus en cave.

Moulin-à-Vent Champ de Cour 2005

Château des Jacques (Romanèche-Thorins – 71)

Nez doux, au boisé tendre, sur des notes délicates de rose
fanée. La bouche est fraîche, puissante et tonique. On retrouve des notes
florales, de pivoine, sur un fond grillé, épicé. Le vin, encore très frais,
dense, harmonieux, termine sur des notes agréables de fraise de bois.

Fleurie 2005

Domaine des Marrans (Fleurie – 69)

Nez riche, puissant et serré, la bouche est structurée,
riche et d’une belle fraîcheur aromatique avec un potentiel de garde évident, à
suivre !

Beaujolais-Villages Cuvée Quintessence 2005

Domaine des Nugues (Lancié – 69)

Robe intense, nez puissant, sur des notes de cerise noire et
de fumée. La bouche est riche, concentrée et épicée. Le vin est solide,
équilibré, droit et frais, digne des meilleurs crus du Beaujolais.

Morgon Côte de Py 2005

Louis-Claude Desvignes (Villié-Morgon – 69)

Robe soutenue. Le nez est encore frais, acidulé, sur des
notes de fraise cuite, d’épices et de poivre gris. La bouche est puissante,
droite, sans faille ! Vin solide, droit, frais aux tanins épicés de belle
facture. La classe !

Chénas Vignes de 1939 Millésime 2003

Pascal Aufranc (Chénas – 69)

Nez ouvert, sur les fruits rouges et le sous-bois. La bouche
est dense, riche, avec des notes d’humus, de fruits sauvages. En bouche, le vin
est riche, mais aussi frais et harmonieux, ce qui n’était pas gagné sur ce
millésime solaire !

Brouilly Vieilles Vignes 2000

Gabriel Jambon (Charentay – 69)

Nez élégant, de fruits écrasés et de fraise des bois. La
bouche est délicate, gourmande, équilibrée avec des tanins fins. Vin agréable,
de plaisir immédiat, parfait à boire aujourd’hui. Les vignes de 60 ans ont
révélé tout leur potentiel.

Fleurie Le Clos 1999

Domaine des Grands Fers, Christian Bernard (Fleurie – 69)

Superbe robe sombre, à peine évoluée ; nez sur des notes chocolatées
et de fraise confite. La bouche révèle des tanins d’une belle finesse. Un très
beau vin qui a encore de l’avenir et quelle jeunesse en bouche !

Chénas 1999

Hubert Lapierre (La Chapelle de Guinchay – 71)

Robe grenat, nez somptueux avec des notes de fruits rouges
et noirs, boisé fin avec des nuances florales. La bouche est équilibrée avec de
la fraîcheur, du fruit, des tanins affinés et une superbe longueur.

Morgon Côte de Py 1990

Dominique Piron (Villié-Morgon – 69)

Un nez joliment évolué sur les fruits mûrs, confiturés. La
bouche présente une belle structure, enrobée, aux tanins soyeux. Le vin «
pinote ». Il est fin, gourmand, délicieux à boire aujourd’hui.

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